Les ONG internationales et bahreïnies condamnent fermement le recours répété à la peine de mort par les autorités bahreïnies et appellent le gouvernement à commuer la peine capitale.

Le 31 décembre 2015, la 4ème Cour pénale du Bahreïn a condamné un homme à mort et 22 autres à une peine de prison à perpétuité, élevant le nombre total de personnes condamnées à mort dans le pays à 10. Le gouvernement a également déchu tous les accusés de leur nationalité, faisant s’élever à plus de 200 pour l’année 2015 seulement le nombre de dénaturalisations. Ce même jour, le premier recours en appel interjeté par le détenu condamné à mort Salman Isa a été rejeté.

La cour pénale a condamné 12 des 23 accusés in absentia, parmi lesquels Hussein Abdullah Khalil Ebrahim, âgé de 27 ans, condamné à mort. Hussein Abdullah Khalil Ebrahim et Ahmed Isa Adulhussein Hussein ont été jugés coupable d’avoir monté une organisation terroriste, recruté des agents, participé aux émeutes et installé des explosifs pour troubler la paix et visé des officiers de police. Ils sont également accusés du meurtre d’un officier de police en 2014 afin de renverser le régime par la force. Cependant, seul Hussein Ebrahim a été condamné à mort.

Onze des accusés, parmi lesquels deux mineurs de 16 et 17 ans, ont été arrêtés en décembre 2014 suite à la mort d’un officier de police tué lors d’une explosion dans le village de Demistan, le 8 décembre 2014. La plupart des prévenus ont été victimes de disparition forcée pendant dix jours, et la police leur a refusé le recours à un avocat durant les interrogatoires. Les accusés ont déclaré avoir été torturés par des agents du gouvernement pendant leur disparition forcée. La cour a jugé les 23 prévenus coupables de terrorisme et du meurtre d’un officier de police. Deux prévenus ont également été condamnés à une amende de 200 000 Dinars de Bahreïn (530 000$ USD).

Mohsen Ebrahim Hasan al-Majed est un des détenus qui a été soumis à de violentes tortures après son arrestation dans la nuit du 14 décembre 2014. Après son arrestation, le gouvernement l’a transféré au Département des Enquêtes Criminelles pour l’interroger. Des officiers l’ont alors agressé physiquement, lui portant des coups à la tête et aux organes génitaux, et l’ont soumis à l’électrocution. Al-Majed a rapporté à sa famille que les officiers l’avaient frappé avec une planche de bois cloutée. Les officiers ont insulté sa religion et l’ont agressé sexuellement. Après trois jours de torture continue, Al-Majed a avoué les faits qui lui étaient reprochés. Il a continué à être battu. La police l’a ensuite transféré au Service des Poursuites Pénales, ou on l’a menacé de recourir à la violence physique s’il se rétractait. Al-Majed a été condamné à perpétuité et a reçu une amende de 200 000 BD.

Le Bahreïn a vu les condamnations à mort et les dénaturalisations augmenter en 2015. Les juridictions bahreïnies ont condamné sept personnes à mort l’année dernière. Le jour où Hussein Ebrahim a été condamné à la peine capitale, la Haute cour d’appel a rejeté la demande de Salman Isa Ali, que la Cour pénale avait condamné à mort en avril 2015 suite à un attentat à la bombe.

En novembre 2015, la Cour de Cassation (la plus haute cour d’appel de Bahreïn) a rejeté l’appel des condamnés à mort Mohammad Ramadan et Husain Moosa. Ramadan et Moosa sont les premiers depuis 2010 à avoir épuisé toutes les procédures judiciaires d’appel possibles, et risquent une exécution imminente. Les défenseurs des droits humains qui sont sur le terrain craignent que ce risque n’ait accéléré l’exécution du Cheik Nimr al-Nimr et de 46 autres condamnés à mort en Arabie Saoudite, exacerbant les tensions de la semaine dernière.

Entre-temps, une enquête menée par l’Institut pour les Droits et la Démocratie de Bahreïn (BIRD) a révélé que le gouvernement a privé 208 personnes de leur citoyenneté en 2015 après que des amendements législatifs aient donné le droit aux Cours de dénaturaliser les prévenus jugés coupables de terrorisme. La plupart de ces individus ont été soumis à des procès inéquitables, ont été torturés et laissés apatrides.

Les procès inéquitables, le recours à la torture, et les condamnations à mort prononcées au Bahreïn peuvent constituer une violation du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques auquel le Bahreïn a accédé en 2006, notamment de l’article 6 qui protège le droit à la vie, de l’article 7 sur le droit de ne pas être torturé, et de l’article 14 qui défend le droit à un procès équitable. Le Bahreïn aurait aussi enfreint l’article 15.1 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, qui affirme que « tout individu a droit à une nationalité. »

Nous, organisations signataires, condamnons fermement le recours à la peine de mort à Bahreïn, notamment à la lumière des procès inéquitables et de la torture auxquels bien des condamnés à mort ont été soumis. Compte-tenu de ceci, nous appelons le Gouvernement de Bahreïn à :

- commuer toutes les condamnations à mort.
- décréter un moratoire sur la peine de mort en vue de l’abolir.
- enquêter, et poursuivre les auteurs de, tout acte de torture, maltraitance, et disparition forcée.
- mettre en place des procédures pour assurer le caractère équitable de tous les procès pénaux et des procédures d’appel.