Le Centre Bahreïnien pour les Droits de l’Homme se déclare vivement préoccupé du nombre croissant d’activistes reconnus coupables pour avoir exercé leur liberté d’expression sur de vagues accusations telles que « injure au roi », « incitation à la haine envers le régime » et injure à d’autres institutions étatiques. Le BCHR condamne fermement ces restrictions continues du droit à la liberté d’expression au sein du Royaume de Bahreïn.
Le 31 août 2016, les autorités de Bahreïn ont condamné trois militants et des utilisateurs de réseaux sociaux qui ont publié des déclarations ou prononcé des discours dans lesquels ils auraient prétendument insulté le Roi ou les autorités du Royaume. Une affaire implique Taiba Ismaeel, agée de 33 ans, qui a été condamné à un an de prison et a reçu une amende de 1000 dinars bahreïniens à cause d’un certain nombre de tweets publiés sur son compte Twitter personnel. Les autorités bahreïniennes l’ont arrêtée le 26 juin sans présenter de mandat d’arrêt et ont fouillé son appartement et confisqué son téléphone portable. Le ministère public a interrogé Ismaeel le jour suivant et l’ont accusé d’« injure au roi et incitation à la haine contre le régime », des accusations fréquemment utilisées par les autorités contre les utilisateurs de Twitter.
Une seconde affaire en lien avec Twitter implique Hameed Khatam, qui a été arrêté le 25 juillet dans sa maison à Samaheej et accusé d’ « injure au roi et incitation à la haine envers le régime » à cause de commentaires fait sur son compte Twitter personnel. Après un procès expéditif, les autorités ont condamné Khatam à deux ans de prison. Khatam et Taiba ont été tout deux accusés d’utiliser des comptes twitter anonymes.
Une autre affaire implique un religieux, Majeed al-Mishal, qui a reçu une peine de deux ans de prison. Al-Mishal, qui est à la tête de la plus haute institution religieuse chiite à Bahreïn, a été arrêté fin juillet 2016 et accusé d’être le meneur du sit-in à Duraz et d’avoir appelé le peuple à rejoindre le rassemblement. Le sit-in de Duraz a commencé juste après la révocation de citoyenneté de Cheikh Isa Qassim et provoqué des manifestations massives dans le pays et en particulier dans la ville natale de Qassim, Duraz. En plus de l’avoir accusé de fomenter les protestations à Duraz, les autorités ont accusé Al-Mishal d’incitation à la haine envers le régime.
Le droit d’exercer librement sa liberté d’expression est souvent criminalisé à Bahreïn ainsi que l’utilisation de réseaux sociaux tel Twitter. Depuis début 2016, le BCHR a signalé dix condamnations délivrées par des tribunaux d’instance ou par des cours d’appel basé sur des accusations incluant dont « injure au roi », « incitation à la haine envers le régime » ou bien « injure au ministère de l’Intérieur ». Les peines forment un total de 27 ans et cinq moins de prison et des amendes d’un montant de 12 100 dinars bahreïniens (USD 32 100). Dans cinq de ces dix affaires, les accusations sont basées sur des déclarations postées sur Twitter, formant un total de dix ans et cinq mois de prison et des amendes d’un montant de 12 100 dinars bahreïnien.
De plus, huit autres personnes sont à présent jugés pour des accusations similaires, et au final cinq d’entre-elles sont actuellement détenues. Parmi elles se trouve le président du BCHR et l’éminent défenseur des droits de l’homme Nabeel Rajab qui fait face à diverses accusations dont « injure au ministère de l’intérieur » par rapport à des tweets et retweets publiés en 2015 à propos du conflit au Yémen et de la torture à la Prison Jaw. Rajab risque de voir sa peine d’emprisonnement augmenter jusqu’à 15 ans s’il est reconnu coupable. Cependant, son procès a été reporté trois fois et doit maintenant avoir lieu le 6 octobre 2016.
Une des cibles récurrente du gouvernement bahreïnien est l’activiste Zainab Al-Khawaja qui a été fréquemment emprisonnée ces cinq dernières années. Plus récemment, les autorités ont arrêté Al-Khawaja le 14 mars 2016 pour qu’elle purge une peine de 2 ans et 4 mois de prison et a reçu une amende de 3 000 dinars bahreïniens (USD 7 900) pour avoir déchiré une photo du roi. Bien qu’elle ait été libérée le 31 mai 2016 pour raisons « humanitaires », sa sentence a seulement été suspendue et elle a été forcée de partir en exil au Danemark à cause de menaces de détention pour une durée indéterminée.
Selon l’Article 214 du code pénal de 1976, « une peine de détention comprise entre 1 an et 7 ans et une amende comprise entre 1000 BD et 10 000 seront infligés sur quiconque a offensé en public le monarque du Royaume de Bahreïn, le drapeau ou l’emblème national ». Il n’est pas spécifié ce que la loi considère comme une offense, laissant de la marge aux autorités pour criminaliser n’importe quelle forme de critique du roi.
Le BCHR est vivement alarmé par la pratique de plus en plus courante de museler la dissidence et les droits à la liberté de parole et d’expression en particulier sur les réseaux sociaux. Nous condamnons la tactique systématique grandissante de diminuer l’accès à l’information et à tout commentaire critique du gouvernement en bloquant les sites web, en interrompant l’accès à Internet et en essayant d’empêcher toute forme d’information qui n’est pas dans la ligne du discours gouvernemental.
Les mesures du gouvernement du Bahreïn sont en violation directe de l’Article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) qui garantit le droit à la liberté d’expression sur n’importe support. Y est déclaré que « toute personne a droit à la liberté d’expression; ce droit comprend la liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce, sans considération de frontières, sous une forme orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen de son choix ».
Compte tenu de ce qui a été mentionné ci-dessus, le Centre Bahreïnite pour les Droits de l’Homme appelle le gouvernement bahreïnien à :
Libérer immédiatement et sans conditions tous les utilisateurs d’Internet et les militants arrêtés et emprisonnés pour avoir simplement exercé leurs droits à la liberté de parole et d’expression ;
Se conformer aux normes internationales par le respect du droit à la liberté d’expression dans aucune restriction ;
Mettre fin aux représailles de nature politiques à l’encontre des militants tout comme aux utilisateurs de réseaux sociaux qui ont exercé pacifiquement leur droit à la liberté d’expression et les autoriser à exercer librement leurs droits à la liberté de parole.