Risque de condamnation à mort

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Le 21 février 2018, la haute cour d’appel militaire bahreïnie va rejuger huit hommes condamnés en première instance à l’issue d’un procès inéquitable marqué notamment par la prise en compte d’aveux obtenus sous la torture. Quatre ont été condamnés à mort et risquent de voir leur peine confirmée. 

Le 27 décembre dernier, à l’issue d’un procès inéquitable, la Haute cour militaire a condamné 13 hommes pour avoir formé un groupe terroriste et tenté d’assassiner un haut responsable des Forces de défense bahraïnies. Tous ont été déchus de leur nationalité. Cinq d’entre eux sont en fuite à l’étranger et les huit autres, en détention, ont fait appel. 

Parmi eux, Sayed Alawi, Sayed Fadhel Abbas, Mubarak Adel Muhanna et Mohamed Abdulhassan Al Mutaghawi ont été condamnés à mort. Mohamed Shehabi, Hussain Shehab, Mohammed Al Najar et Mohammed Al Ajami ont été condamnés à sept ans d’emprisonnement. 

Selon le Centre bahreïni pour les droits de l’homme, les accusés ont été torturés après leur arrestation. Certains d’entre eux ont été victimes de détention au secret pendant plusieurs mois comme c’est le cas de Mohammed Al-Shehabi et Mohamed Abdulhassan Al Mutaghawi. Sayed Alawi et Sayed Fadhel Abbas ont été détenus au secret pendant près d’un an, malgré les tentatives désespérées de leurs familles d’avoir de leurs nouvelles. 

Aucun des accusés n’a pu voir son avocat avant le procès. Certains ont même dû attendre la troisième audience avant d’en consulter un. Les familles ont été menacées de représailles si elles diffusaient publiquement les allégations de torture des détenus.

Il s’agit de la première condamnation prononcée par un tribunal militaire à l’encontre de civils depuis la réforme constitutionnelle du 3 avril 2017 autorisant la juridiction militaire à juger des civils. La recrudescence des condamnations à mort et des procès militaires est symptomatique d’une gouvernance autoritaire qui continue d’exercer une violente répression sur l’opposition, en toute impunité.

Contexte

La reprise des exécutions

22 bahreïnis sont actuellement condamnés à mort. Après sept ans de moratoire de fait, les exécutions ont repris il y a un an. Le 15 janvier 2017, Ali Al-Singace, Abbas Al-Samea et Sami Mushaima ont été exécutés après avoir été condamnés à l’issue d’un procès inéquitable, au point que la Rapporteure spéciale des Nations unies sur les exécutions extra-judiciaires a qualifié leur exécution d’extrajudiciaire.

Le 29 janvier 2018, une nouvelle condamnation à mort a été confirmée par la Cour de cassation. Maher Abbas Ahmad avait été condamné par la cour d’appel civile le 11 mai 2017 sur le fondement d’aveux signés sous la torture. Si le roi ratifie sa condamnation, il pourra être exécuté à tout moment.

La normalisation du recours à la justice militaire

En 2011, année du début du soulèvement populaire au Bahreïn, plusieurs défenseurs des droits de l’homme et opposants politiques ont été condamnés par la Cour de sûreté nationale, une juridiction d’exception fondée sur l’état d’urgence décrété par le souverain le 15 mars 2011. Trois mois plus tard, sous la pression internationale, ce dernier a ordonné la création d’une commission d’enquête indépendante bahreïnie (Bahrain Independent Commission for Investigation, BICI), chargée d’enquêter sur les évènements – à savoir la violente répression – qui se sont produits au Bahreïn en février et mars 2011. Dans son rapport publié en novembre 2011, la BICI a vivement critiqué les procès inéquitables tenus devant la Cour de sûreté nationale, demandant à ce que les affaires soient rejugées par un tribunal civil. Les autorités avaient à l’époque accepté que les accusés soient ainsi rejugés.

En contradiction avec les recommandations de la BICI et en violation des engagements internationaux du Bahreïn en matière de droit à un procès équitable, le 3 avril 2017, le monarque a amendé la constitution afin de prévoir la compétence des tribunaux militaires pour juger des civils. Les 13 condamnés concernés par cet appel urgent en sont les premières victimes.

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