De nouvelles mesures de sécurité et des arrestations pour juguler les manifestations, les outils de répression de l’activisme sont renforcés à Bahreïn

Duraz2016-2

Le Centre Bahreïnite pour les Droits de l’Homme (BHCR) condamne la répression continue des autorités bahreïniennes à l’encontre de manifestants pacifiques exerçant leur droit à la liberté d’expression et de réunion. La sécurité et le bien-être des protestataires sont actuellement menacés car le gouvernement a intensifié davantage ses tentatives de répression de toutes formes de dissidence pacifique.

Suite à la révocation de citoyenneté de Cheikh Isa Qasim, le chef spirituel des chiites de Bahreïn, le 20 juin 2016, le peuple est descendu massivement dans les rues, en nombre sans précédent depuis 2011, pour manifester contre la décision du ministre de l’Intérieur (MOI) de rendre Isa Qasim apatride.

L’équipe du BHCR sur le terrain a répertorié plusieurs manifestations durant lesquelles la police a pris des mesures sévères pour mettre fin aux rassemblements incluant l’utilisation de gaz lacrymogène et de tirs au plomb. Du 20 au 22 juin 2016, un total de 46 manifestations pacifiques a eu lieu à Bahreïn parmi lesquelles une dizaine fut assaillie par la police anti-émeute.

Ainsi, le 20 juin 2016, les forces de police ont tiré sur la foule, à l’aide de fusils, dans les villes de Juffair et d’Aali causant des blessures aux manifestants. Le 20 juin 2016, des manifestants pacifiques sont descendus dans les rues à Al-Dair, Adhari et Bilad Al-Qadeem où ils furent reçus par les forces de polices bahreïniennes.

De plus, depuis le 21 juin 2016, des forces de police ont été déployées autour de Duraz où un sit-in vaste et ouvert à tous a débuté devant la maison de Cheikh Qasim pour protester contre la révocation de sa citoyenneté. Les forces de sécurité auraient contrôlé et limité l’accès de cette zone occasionnant ainsi des difficultés aux habitants du quartier et aux travailleurs pour s’y rendre. Les forces de sécurité ont bloqué plusieurs entrées du secteur et installé des checkpoints pour contrôler l’identité de ceux qui souhaitaient entrer. Plus tôt, le ministre de l’Intérieur a mis en garde les personnes sur place « contre les appels aux troubles affectant la sécurité » en ajoutant que «des actions légales seront prises envers les contrevenants. »

En outre, le 23 juin 2016, à 8 heures, six religieux ont été convoqués au commissariat de police de Budaiya pour un interrogatoire et ont été déférés devant le procureur général pour être interrogé. Selon la déclaration du MOI, ils font face à des accusations de « rassemblement illégal à Duraz et incitation à violer la loi ». La déclaration fut peu après retirée du site internet et des sites d’informations locaux. Les religieux actuellement poursuivis et détenus sont : Cheikh Mahmood Al-Aali (occupant une position importante dans le désormais interdit Council of Islamic Scholars), Cheikh Hamza Al-Dairi (ancien député), Cheikh Fadel Al-Zaki (occupant lui aussi une position importante au sein du Council Islamic Scholars), Cheikh Muneer Al-Matooq, Cheikh Ali Rahmah et Cheikh Ebrahim Al-Safa. Deux chanteurs religieux à succès sont également poursuivis et détenus : Mahdi Sahwan et Jafar Al-Qashami.

masse sit-in à Duraz

Avec la hausse actuelle des atteintes aux droits de l’homme qui ont été répertoriées à Bahreïn, le BHCR exprime sa plus vive préoccupation en ce qui concerne l’avenir de la société civile bahreïnienne et demande au gouvernement bahreïnien de mettre fin à l’usage excessif de la force et respecter le droit à la liberté d’expression et de réunion. Le BHCR est aussi inquiet par une éventuelle escalade contre les manifestants pacifiques organisant un sit-in à Duraz.

Au cours des deux dernières semaines, les autorités bahreïniennes ont intensifié les mesures pour réprimer l’activisme pour les droits de l’homme et en faveur de la démocratie comme interdire la plus importante organisation et parti d’opposition, Al-Wefaq National Islamic Society, après avoir doublé la peine prononcée contre Cheikh Ali Salman, secrétaire général d’Al-Wefaq, peine se chiffrant désormais à neuf ans d’emprisonnement. Le 14 juin 2016, le ministre du développement social a dissous les deux bastions restants de la communauté chiite à Bahreïn, Al-Risala Islamic Society et Islamic Enlightnement Society. À cela s’ajoute la convocation de neuf religieux chiites pour un interrogatoire le 15 juin 2016.

De plus, Nabeel Rajab, le président du BCHR et éminent défenseur des droits de l’homme, a été arrêté et détenu le 13 juin 2016 pour « diffusion de fausses nouvelles et de rumeurs sur la situation interne dans le but de discréditer Bahreïn ». Des interdictions de voyager ont en outre été imposées à douze militants allant à Genève pour la 32ème session du CDH ainsi qu’à d’autres personnes tentant de quitter le pays.
Bahreïn a signé et ratifié le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) en 2006 et, en tant que signataire, Bahreïn doit respecter et soutenir la liberté d’expression et de réunion lesquelles sont explicitement stipulées dans les articles 19 et 21. L’article 19 souligne le droit d’une personne d’exprimer son opinion et l’article 21 déclare que « le droit de réunion doit être reconnu ». Ces deux articles ont été enfreints par les autorités en de multiples occasions.  

Le Centre Bahreïnite pour les Droits de l’Homme appelle le gouvernement bahreïnien à :

  • Mettre un terme à l’utilisation systématique et injustifiée de la force sur des manifestants pacifiques exerçant leur droit à la liberté d’expression et de réunion ;
  • Abroger l’ensemble des restrictions imposées à la société civile ; et
  • Se conformer à la législation internationale assurant le droit à la liberté d’expression et de réunion sans aucune restriction ou procédure juridique arbitraire.

 

L'accès à Duraz bloqué par un véhicule de sécurité

attaque au gaz lacrymogène sur Bilad Al Qadeem

attaque au gaz lacrymogène sur Bilad Al Qadeem